Le Gym version 2015-2016 restera marqué par un sublime jeu collectif magnifié par le génie de l'un des plus grands talents du foot français. A Nice, il a vécu la meilleure saison de sa carrière

 

La Côte d'Azur a toujours été terre d'inspiration pour les grands artistes. Picasso, Matisse, César, Berlioz, Tchaïkovski, Chagall... et Ben Arfa aussi. « Ce n'est pas un joueur de foot, c'est un artiste avec ses sensibilités, sa créativité, son génie. Sur un terrain, il ne voit rien comme les autres » décrypte Mathieu Bodmer, l'ami qui a conseillé à Hatem de venir à Nice. Une seule saison partagée à l'OL (2007-08) a façonné un « amour de frères » entre les deux hommes. En janvier 2015, une simple photo sur Twitter a été perçue comme une bouteille à la mer par Bodmer. « On y voyait Hatem à la sortie d'un "five" (cinq contre cinq). Je ne savais pas qu'il avait résilié son contrat à Hull. Il était en léger surpoids, on va dire (sourire). Ça m'a fait mal au cœur de voir les commentaires. Connaissant son immense talent, je me suis dit que je n'étais pas plus fou qu'un autre : il pouvait changer le destin de notre fin de saison ».

 

Claude Puel : « Quelqu'un qui n'était pas tordu »


Jean-Pierre Rivère et Julien Fournier, qui a connu HBA à l'OM (2008-10), se laissent convaincre par l'idée. Restait à effacer les réserves que pouvait inspirer l'association du joueur avec un coach exigeant comme Claude Puel. « On a discuté longuement, j'ai rencontré quelqu'un de posé, qui aimait le football, raconte l'entraîneur. Il suivait les matchs, il avait une idée sur le jeu. Je l'ai trouvé apaisé, contrairement à l'image qu'on renvoyait de lui : ingérable, épidermique... J'ai vu quelqu'un qui n'était pas tordu, c'était le plus important. »

 

Quelques jours plus tard, Ben Arfa est à l'entraînement. « Dans le vestiaire, les mecs n’arrivaient pas à croire qu’il nous rejoindrait. Sa simple présence a provoqué une émulation et on a commencé à gagner des matchs », constate “Bod”, n’oubliant pas de féliciter ses anciens dirigeants : « Il fallait avoit le cran de faire Ben Arfa ». Un protagoniste met pourtant son veto à l'idylle naissante : la commission juridique de la Ligue, qui s'appuie sur la Fifa pour considérer qu'une rencontre disputée avec la réserve de Newcastle empêche Ben Arfa de jouer pour un 3e club dans la même saison. Un simple contretemps.

 

Car en privé, le natif de Clamart a donné sa parole aux dirigeants niçois : il reviendra l'été suivant. « Je n'avais aucun doute sur le fait qu'il tienne parole, insiste Bodmer. Le seul regret que j'avais, c'est qu'il ne signe que pour un an. »

 

Installée près du Port, la recrue suscite une attente énorme. Fin juillet, dans la boutique officielle du Gym, le nombre de supporters franchit le millier pour l’accueillir. Le service d'ordre est dépassé, la star doit annuler la série de jongles prévue près de la fontaine Massena. Des filous profitent de l’hystérie pour dévaliser les rayons de la boutique. Sans qu'il n'ait encore disputé la moindre minute de jeu, la folie Ben Arfa est amorcée. Restait à relancer la condition physique d'un joueur absent des terrains depuis neuf mois. « On a mis un programme spécifique en place, avec des objectifs, des projections, détaille Alexandre Dellal, le préparateur physique. A mesure que nos prédictions se vérifiaient, Hatem prenait confiance en notre travail et s'impliquait davantage. »

 

Gioria : « Claude l’a géré avec malice et écoute »


Après deux buts au cours des trois premières journées, Ben Arfa réalise un festival entre fin septembre et la mi-octobre : doublé contre Bordeaux (6-1), doublé à Saint-Etienne (4-1), un but et une passe décisive à Rennes (4-1). Ben Arfa crève l'écran en prime time sur Canal et le Gym, meilleure attaque du championnat (24 buts), s'affirme comme l'équipe révélation de la saison après seulement dix journées. « Il y avait une super équipe à tous les postes. Mais lui, c'était Monsieur Plus », reconnaît Puel, qui a façonné un 4-4-2 en losange pour le placer au cœur du jeu, derrière Plea et Germain et devant Koziello, Mendy et Seri. « C'est le meilleur joueur que j'ai croisé. Claude a su parfaitement le gérer, avec beaucoup de malice et d’écoute, appuie Frédéric Gioria, coach adjoint. Il ne lui demandait pas beaucoup de défendre, si ce n’est les 5 premières secondes à la perte de balle. »

 

HBA : « A Nice, je suis au paradis »


Didier Deschamps aussi est séduit, HBA est rappelé en équipe de France pour affronter l'Allemagne et l'Angleterre, deux matchs amicaux tristement marqués par les attentats de Paris. « J'étais en enfer. A Nice, je suis au paradis. Je reviens de très, très loin, confie le numéro 9 à Nice-Matin, venu à sa rencontre à Clairefontaine. Le président, le coach, mes coéquipiers, Julien Fournier et les supporters m'ont mis dans les meilleures dispositions. Sans tous ces gens, je n'aurais pas retrouvé le haut niveau. »

 

Ce seront les cinquante-cinq dernières minutes en Bleu de Ben Arfa, « un joueur de match, glisse un ex-coéquipier. Il s'impliquait moins à l'entraînement, mais ça ne nous dérangeait pas plus que ça tant qu'il nous faisait gagner le week-end ».

 

C'est encore le cas en janvier, quand HBA s'offre des slaloms légendaires et un doublé contre Angers (2-1). Avant de s'éparpiller au micro de beIN. « Angers a de bons joueurs, ils peuvent jouer. Ils n’ont fait que courir après le ballon. Je ne sais pas comment ils prennent du plaisir. » Une sortie peu appréciée par le président angevin. Quand Said Chabane le croise en zone mixte, il ne peut s'empêcher de lui taper sur l'épaule. « Grandis un peu, respecte un peu ! »

 

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