L’ex-attaquant de Montpellier explique comment il réussit son intégration dans un secteur offensif dense à Nice, grâce à une conception généreuse du jeu.

NICE – Au moment où Andy Delort nous racontait, jeudi, son bonheur d’évoluer à l’OGC Nice, le sélectionneur algérien Djamel Belmadi déplorait sa décision d’arrêter l’équipe nationale pendant un an. Même s’il s’expose aux critiques, l’attaquant veut se concentrer sur le Gym qu’il a rejoint le 28 août, en provoquant aussi la colère des supporters montpelliérains, fâchés de voir partir leur capitaine. Avec Delort, les ruptures sont souvent douloureuses mais ses premières semaines niçoises ont été idylliques. Déjà auteur de deux buts et d’une passe décisive, il enrichit un secteur offensif qui s’appuie sur deux autres talents d’envergure, Amine Gouiri et Kasper Dolberg. À 30 ans, fêtés samedi, il estime traverser sa meilleure période et souhaite montrer que la concurrence se vit bien mieux si on sait partager.

 

« Comment choisissez-vous un club ?

 

J’aime le foot et l’humain. C’est à l’instinct. J’essaye de faire le meilleur choix à chaque fois, et c’est bien ou pas bien. C’est compliqué car ça va toujours être commenté, mais on est obligé de faire des choix dans une carrière.

 

Vous en avez fait beaucoup (onze)…

 

Mais ça ne dépend pas que de moi. Quand je suis à Tours (L2, 2013-2014), le club a des problèmes financiers et je suis obligé de partir en Angleterre (àWigan)alors que je ne voulais pas y aller. À Caen (L1, 2015-2016), je voulais profiter de ma très belle saison. Le foot, c’est voyager, c’est commeça.

 

Ça n’entre pas en contradiction avec votre attachement à un esprit familial ?

 

Je suis franc et parfois, ça a pu choquer des gens que je puisse dire que j’aime un autre club, comme Lens, car ça pue le foot. L’AC Ajaccio me tient à cœur car j’y ai vécu une aventure humaine, l’entraîneur Olivier Pantaloni m’a énormément aidé. Et je serai toujours attaché à Montpellier, je n’oublierai jamais les moments extraordinaires.

 

On dirait que les supporters les ont oubliés…

 

Ça m’a fait beaucoup de mal. Ils n’ont pas pris en compte mon envie d’aller au-dessus, tout le bien que j’ai fait à Montpellier en trois belles saisons. Je peux les comprendre mais je ne pensais pas que ça partirait aussi loin. Comme je suis l’enfant du club, c’est mal passé.

 

Vos expériences à l’étranger (Wigan, Tigres de Monterrey) n’ont pas été concluantes. Vous vous épanouissez surtout dans les clubs du sud ?

 

Pas forcément, car il ne faisait pas si beau que ça à Caen… Mais ces clubs me correspondent, je suis un pur sudiste. À Nice comme à Montpellier, il y a la mer, ça me facilite l’adaptation. Je me sens bien.

 

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Vous êtes venu à Nice pour Christophe Galtier ?

 

Bien sûr, et pour intégrer ce projet. Je suis encore plus content quand je vois les infrastructures. C’est le plus pro, le mieux encadré des clubs où je suis passé. Galtier amène la culture de la gagne à l’équipe mais aussi à tout le club, toute la ville, c’est ce qui est extraordinaire avec lui.

 

Comment expliquez-vous votre attachement à lui ?

 

Ça remonte à loin. On parle du numéro 1 en France, à travers le charisme qu’il dégage, les résultats. Lille est dans le mal, il arrive et devient champion. Il apprend énormément aux joueurs. Ça fait à peine plus d’un mois que je suis là et j’ai déjà beaucoup progressé. J’avais envie de passer un cap et ici, il y a tout pour viser plus haut.

 

Vous avez changé d’agent cette année pour travailler avec le fils de Galtier. Comprenez-vous que cela soulève des questions ?

 

La réponse est vite faite : regardez mes stats des trois dernières saisons (14, 9, et 15 buts en L1). Si j’avais marqué zéro but, mon transfert aurait pu être un coup d’agent. Mais là…

 

Vous ne craignez pas de passer pour le chouchou de l’entraîneur ?

 

Ce qui compte, c’est ce qu’on donne sur le terrain. J’étais déjà comme ça à Montpellier, et mon agent n’était pas le fils de l’entraîneur.

 

Sur quoi repose la rapidité de votre intégration ?

 

C’est mon caractère, je suis un mec de vestiaire. J’ai un peu d’expérience, je sais m’adapter, et mon jeu amène plus de confiance. Les mecs voient que je ne triche pas.

 

Comment partage-t-on le gâteau avec trois attaquants pour deux places dans le 4-4-2 ?

 

La solution, c’est jouer les uns pour les autres, comme Amine (Gouiri)le faisait avec Kasper (Dolberg). Je leur ai dit en arrivant que ça allait se faire tout seul. Tu vois tout de suite les équipes où ce n’est pas naturel, et ce n’est bon pour personne. Avant, j’aimais bien faire la gueule quand je n’avais pas marqué, aujourd’hui non. Les autres finissent toujours par te rendre ce que tu donnes. Si je suis sur le banc, j’ai un peu les boules mais quand j’entre, j’essaye d’être bon car si tu ne fais pas le taf, tu resteras sur le banc. Après, je ne mens pas, j’aime passer le plus de temps possible sur le terrain…

 

À Montpellier, la question ne se posait pas.

 

C’est ce que j’avais envie de découvrir à un niveau supérieur, pour ne pas être dans un fauteuil. À Montpellier, que je fasse une bonne ou une mauvaise semaine, on avait notre équipe. Ici, le relâchement n’est pas possible avec la qualité des attaquants.

 

Pourquoi ça fonctionne avec Dolberg et Gouiri ?

 

On l’a senti dès les premières combinaisons, on a ce truc en commun. Chacun a son caractère, mais sur le terrain, même si tu ne te comprends pas par la langue, tu sais où l’autre va mettre le ballon et où il le veut. Avec Gaëtan (Laborde, à Montpellier), on se trouvait les yeux fermés, on pensait exactement la même chose. C’est tellement beau d’avoir cette relation, je veux vivre ça avec Amine et Kasper.

 

Êtes-vous autant attaché aux passes qu’aux buts ?

 

Je ne pense pas à ma gueule et j’adore m’appliquer pour donner un bon ballon. C’est devenu un plaisir alors que si tu es jeune, tu veux plus forcer le destin en tirant au lieu de passer. Les passes sont plus valorisées maintenant, mais les trente secondes après un but marqué, c’est un truc de fou. Il y a tout qui monte, que ce soit un beau but ou un but dégueulasse. C’est comme un feu d’artifice en toi. Enfin maintenant, t’as un feu d’artifice mais t’attends le VAR pour qu’il soit tiré…

 

Jouer pour les autres, c’est aussi jouer sans ballon ?

 

J’aime aller au charbon, défendre, avec cet état d’esprit qui booste les équipiers. L’adversaire se dit que ce sera dur s’il n’a que des mecs comme ça à chaque ligne… Pas besoin de me demander de le faire. Il faut juste que l’arbitre donne le coup d’envoi et je cours jusqu’à la fin, si le coach ne m’a pas sorti entre-temps ! » 

 

EN BREF

30 ANS (ALG)

Poste : attaquant. Club : Nice.

Parcours : Nîmes (2009-2010), AC Ajaccio (2010-janv. 2012), Metz (janv. 2012-juin 2012), AC Ajaccio (2012-2013), Tours (2013-2014), Wigan (2014-janv. 2015), Tours (janv. 2015-juin 2015), Caen (2015-2016), Tigres UANL (MEX, 2016-2017), Toulouse (2017-2018), Montpellier (2018-2021), Nice (depuis août 2021).