Ah, ce bon vieux Gym ! Il paraît qu’il est en chacun de nous une sorte de pulsion masochiste. Mais supporter le Gym c’est décidemment assumer cette part de nous même qui fait que… l’on aime ça, souffrir, se complaire dans la nostalgie vaine des temps jadis, résister seul et contre tous à l’opprobre et à son cortège de moqueries qui accompagnent habituellement la simple possibilité qu’il puisse y avoir des personnes assez profondément ravagées pour soutenir l’OGCN. Et pourtant, ces personnes existent. Nous en sommes. Et nous jouissons, à défaut de plaisirs plus simples (les titres, les victoires, la reconnaissance et la célébration publique des exploits des nôtres) du simple fait d’être considérés comme des bêtes curieuses : les supporters de ce club à nul autre pareil : l’OGCN !
Freddy Mercury, peu avant sa mort avait tenu ces propos quasi philosophiques qui disaient en substance : « Il n’y a rien de pire qui puisse arriver dans la vie d’un homme que de supporter un club complètement nul ». Il supportait Crystal Palace. Et Freddy aimait Palace. Plus que de raison. Et comme Freddy, nous, supporters niçois, sommes fiers de ce que nous sommes. De cette part de pathétique qui est en nous et qui fait qu’en apparence, on nous moque, mais qu’en fait, et c’est bien la seule chose qui nous gonfle d’orgueil, on nous envie, comme on envie au fond tous ceux qui ont le courage de leurs opinions, comme on envie cette candidate des élections présidentielles afghanes, ces militants qui passent leurs nuits à aider les sans-abris, ce couple qui adopte un paraplégique ou Mère Térésa.
Les grincheux diront que quasiment au moment ou disparut Mère Térésa, Lady Diana s’encastrait sous un pont de la Seine, et que, bien sûr, il n’y en eut sur nos écrans et sur nos ondes que pour la Princesse. Des torrents de larmes d’un côté, une superbe indifférence de l’autre. Mais Lady Diana était un peu à l’aristocratie européenne ce que l’OGCN n’est absolument pas au foot (contrairement à club voisin qui a volé à peu près tout ce qu’il a gagné et dont nous tairons le nom pour ne pas nous faire d’ennemis) : arrivisme, popularité populiste, médiatisation outrancière et tapageuse, adulation sans la moindre objectivité. C’est comme ça, dans notre monde il n’y en a que des pour les Diana et pour ce qui brille et qui fait vendre, quelles que soient les valeurs véhiculées. Les Mère Térésa, on s’en fout pas mal ; elle ne faisait pas vendre, la Vieille !
Alors oui, on est tous un peu des supporters de Crystal Palace. On aime les causes perdues, désespérées. Obscures et sans relief. Passer sa vie dans la misère crasse, c’est certes un peu ridicule, mais au fond, c’est beau, c’est romantique, c’est grand. Et en ce moment, le Gym c’est vraiment du grand Gym ! C’est même « retour vers le futur ».
En effet, on a tous en mémoire les années 1997-2002. Du très grand Gym à l’époque. Du Gym millésimé, avec relégation administrative à la clé et perte du statut professionnel ! On a eu un Belge-Brésilien qui faisait la socca (c’était d’ailleurs à peu près la seule chose qu’il savait faire), un président milliardaire serbe qui jouait du piano à Miami, un président richissime, un dottore, un onorato, qui faisait des tours d’honneur au Ray tout en imaginant à la place des Présidentielles un centre commercial, à l’endroit des populaires Sud une galerie marchande et en lieu et place des Latérales un centre de loisir. On a eu des Sarli (remarquez, à Créteil ils s’en souviennent encore), des Nicodemo, des Filippini… et même un Regtop. On a frôlé le national et le ridicule et on a même pulvérisé le mur du con en virant Guy David (excès de compétence sans doute !). Jamais peut-être dans son histoire, le supporter niçois n’a été à ce point en phase avec son Moi pulsionnel profond : la défense des causes perdues. On était vraiment, plus que jamais sans doute, tous des Freddy Mercury.
Et puis des Salvioni, des Gernot et des Maurice sont arrivés, et on a même fini par penser avec les années qu’on était en train de redevenir un club comme un autre. Fort heureusement pour le Moi profond du supporter niçois, cela n’a pas duré ! Anto-Roro et Momo sont sur le bateau et décident de sauter à l’eau tous les trois en même temps. Qui reste à bord ? Nous, les supporters du Gym, bien sûr ! Et là, depuis décembre 2008, c’est… le n’importe quoi. Que dis-je, LE GRAND N’IMPORTE QUOI. Un n’importe quoi quintessentiel.
Songez-donc ! Côté terrain, Vannes, qui représente tout de même le cinquième ou le sixième meilleur club… breton vient nous priver de finale. Pas rancunier, on décide de laisser nos potes monégasques continuer leur parcours en coupe, la vraie cette fois-ci (on sait jamais, l’Europe c’est dangereux comme le reprenaient à l’unisson messieurs Antonetti et Cohen). Par ailleurs, on ne voulait surtout pas priver nos grands amis marseillais de points dans leur course au titre. Mais, malgré la fin de cette longuissime seconde partie de saison qui restera dans les annales de l’apathie footballistique et du foutage de gueule intégral, le ridicule persiste. Ainsi, depuis août, le Gym, jadis connu pour la férocité de ses défenses, cultive l’art du but encaissé à la con. Y’a toujours une main, un pied, un bout de type qui traîne aux abords de la surface pour pousser le ballon au fond. Histoire de rigoler. Histoire de voir si on est capable de renverser un match. C’est tellement plus drôle le match avec handicap. C’est tellement fondamentalement Niçois ! Freddy Mercury aurait adoré ça, le foot avec handicap. C’est bien dans notre style ça ! Quant on pense que des équipes comme Bordeaux ou Lyon se contentent froidement et avec un manque absolu d’imagination, de gagner tous leurs matchs ou presque, alors qu’il est des puristes incompris comme nous qui ne vibrent qu’au renversement insensé de situation ! Les autres ne savent décidément pas ce qu’ils perdent à ne pas soutenir notre Gym.
Mais s’il n’y avait que le terrain, il y a les tribunes aussi : vides, pleines, muettes, grondantes, en grève totale, sur le tas, partielle, sans préavis, avec préavis, avec ou sans envahissement des locaux, pour 20 minutes et plus si affinité, mais jamais en manque d’imagination et de ferveur, tout de même ! Et cela prêterait à sourire s’il n’y avait un jeune qui croupit en taule pour avoir balancé une boule de papier, et d’autres qui ont osé brandir un fumigène et qui pointent le samedi au commissariat. Mais ce n’est pas tout, côté coulisse ça vaut aussi sa portion de socca ! Et s’il ne s’agissait que de la démission d’un président unanimement reconnu… Imaginez un peu cela : un ticket Tapie-Courbis ! Ca c’est du solide, du lourd, du crédible. De quoi en imposer à la DNCG et à la commission d’éthique. La clique des ex-taulards : les arbitres vont en chier dans leur froc ! Tiens, en parlant d’arbitres, dans la série c’est VRAIMENT n’importe quoi, je ne parlerai même pas de l’arbitrage « à la noix » contre Monaco, car des matchs comme ça, on en a vu des quintaux. Car il y a autrement plus fort de café, on a trouvé un « homme en noir » qui pratiquait l’erreur d’arbitrage POUR Nice !
Pour finir, pêle-mêle, et « à vot’bon cœur m’sieurs dames » : Stellardo est sur la paille, il aurait dépensé tout son argent en transferts ; un Russe serait prêt à reprendre le Gym mais on ne sait pas si c’est un oligarque milliardaire proche de Poutine ou le pope de l’église russe ; Franck Sauzée aime le Gym (dans la série on s’en fout) ; On recrute un espoir de 19 ans et on fait confiance à une doublure Averellienne toute droit sortie de Lucky Luke (la gâchette en moins !) avant de s’apercevoir tout benoîtement que finalement la défense centrale est à la rue ; Maurice Cohen est au Gym ce que McArthur était aux Philippine (je reviendrai) ; Éric Roy ne porterait pas de costume Armani pour aller à la pêche ; un stade sera construit à Nice d’ici la fin du XXIe siècle et, la rumeur des rumeurs, la plus folle d’entre toutes, le maire-ministre de Nice aurait été aperçu du côté du Ray (les mauvaises langues ajoutent que, ce jour là, il se rendait en fait plutôt au centre administratif).
Bref, ma chronique est la hauteur de l’état actuel du Gym, c’est n’importe quoi, c’est presque du Morlino. Mais au fond tout cela n’est pas bien grave, car… Nous sommes tous des supporters de Crystal Palace !