Mendy : Le saut d'une puce

Parti libre de Monaco pour Nice, ce milieu défensif de poche a quitté un club que de nombreux joueurs rêvent de rallier. Cela mérite des explications.

 

À contre-courant de la vague de stars qui s’est abattue, fin mai, sur le Rocher, Nampalys Mendy a choisi de quitter Monaco pour Nice. À première vue, il peut paraître étonnant de renoncer à l’un des deux palaces de la L1 pour fréquenter un établissement moins luxueux, même si le nid des Aiglons a, aussi, ses charmes. La thèse d’un engagement avec le Gym paraphé dès l’automne dernier circule dans le milieu, où certains jugent que l’entourage du joueur s’est précipité et s’est retrouvé prisonnier de son choix précoce. «Il n’y a jamais eu de précontrat, soutient Yacine Ayad, conseiller du nouvel Aiglon, déterminé à préciser sa chronologie des faits. En juin 2012, j’ai voulu voir les dirigeants pour discuter d’une prolongation, puisque son contrat s’achevait un an après. On m’a répondu que le joueur serait prolongé, mais plus tard. Puis la saison a débuté et, après le premier match faceà Tours (4-0), il s’est retrouvé deux ou trois fois en tribune. La priorité était encore donnée à Monaco, mais on a commencé à se poser des questions. Ensuite, d’autres joueurs qui, eux, n’étaient pas en fin de contrat ont été prolongés. Ça nous a touchés."

 

"Karlsen n'a pas assuré"

 

Alors, en octobre, Yacine Ayad demande à rencontrer la direction, qui cherche, selon lui, une nouvelle fois à gagner du temps et repousse sa demande comme on dégage un ballon, au loin.À ce moment-là, Riccardo Pecini (NDLR: le directeur technique) me dit clairement: “On ne fait rien maintenant, on se revoit peut-être en janvier.”

 

Après, je croise Jean-Luc Buisine (exdirecteur de la cellule de recrutement), qui me demande si la proposition qu’on nous a faite est bonne. Je lui réponds qu’on n’en a reçu aucune. Il me dit: “T’inquiète pas, tu vas en avoir une.” Elle est arrivée en novembre. Elle ne nous a pas satisfaits. Et, surtout, il était trop tard. Tor-Kristian Karlsen (le directeur général exécutif de l’ASM jusqu’en janvier dernier) n’a pas assuré. C’est dommage qu’on n’ait pas discuté plus tôt avec Vadim Vasilyev (nommé directeur sportif en mars 2013). Il était à l’écoute et avait très bien compris mon message. Si ç’avait été le cas, le “petit” serait encore àMonaco.» Mais il a quitté le club princier, nanti d’un choix royal. Selon son représentant, l’Olympique de Marseille, Saint-Étienne,Manchester United ou encore Newcastle ont joué des coudes pour être les premiers sur la ligne d’arrivée, avant d’être dépassés par l’OGCN. «Il ne servait à rien de se précipiter pour rejoindre l’étranger ou un gros club français, martèle Yacine Ayad. On est parti de Monaco pour jouer au football, pas pour gagner de l’argent. Aller à Nice est un choix sportif.»

 

Mais aussi familial, à entendre le natif de La Seyne-sur- Mer, car son court déménagement va lui permettre de rapetisser la distance qui le sépare de sa famille, basée dans le Var. «Ç’a joué dans ma décision», note Mendy, qui, clin d’oeil espiègle du destin, a profité du dernier Festival international de Toulon pour annoncer qu’il s’était enfin déterminé, après avoir fait le tri entre les propositions.

 

Un profil à la Makelele.

 

«Son choix se tient, juge l’ex-international Didier Christophe, qui l’a dirigé au pôle espoirs d’Aix-en-Provence, avant de le retrouver au centre de formation de l’ASM. Pour sa progression, il lui est nécessaire de jouer régulièrement. C’était le cas à Monaco jusque-là mais, au vu du recrutement effectué, on peut imaginer qu’un élément qui ne sera pas bon durant deux ou trois matches de suite sortira de l’équipe.

 

Et puis, à Nice, il va continuer avec Claude Puel, dont l’habileté de post-formateur est connue.» Un an après avoir pioché dans le réservoir des jeunes talents monégasques Valentin Eysseric, l’entraîneur général du Gym a donc subtilisé à l’opulent voisin une petite perle qui sait faire briller les autres. Mendy possède en effet un profil équivalent à celui de Claude Makelele, numéro 6 modèle et modèle de numéro 6.

 

"Il lui ressemble, confirme Frédéric Barilaro, patron du centre de formation monégasque. Il court partout, il est très fort dans l’anticipation du ballon et sa première relance est toujours réussie.» Didier Christophe a découvert cette panoplie complète quand Mendy, surnommé «Papy», a passé le concours d’entrée au pôle espoirs d’Aix-en-Provence. «Si on s’en était tenu à ses tests physiques et techniques, c’était une catastrophe, raconte-t-il. Mais, dès qu’on l’a fait jouer, en deux minutes, tout était réglé, car il possédait le talent du poste: intelligence de jeu, faculté à fermer les angles de passe…» L’intéressé se souvient de ce jour paradoxal, où il a sauté de l’échec à la réussite. «J’avais un peu pris les tests à la rigolade, ce n’était pas mon point fort, sourit Nampalys Mendy, âgé de vingt et un ans. J’avais tout misé sur le terrain.» Ce fut un bon placement.