Arrivé l’été dernier pour muscler l’entrejeu niçois, le Néerlandais est devenu un cadre discret de son équipe, dont il apprécie la soif de victoire.
NICE – Il ne foule jamais un terrain pour rigoler, mais il ne s’en prive pas ailleurs : très bavard, Pablo Rosario (25 ans) a souvent souri pendant qu’il racontait, en anglais, son adaptation à Nice, où son impact fait beaucoup de bien. Après cinq saisons au PSV Eindhoven, le milieu défensif néerlandais (1 sélection) réussit ses débuts à l’étranger, même si son jeu n’attire pas la lumière. Il s’en accommode sans mal car il veut surtout gagner et n’est pas frustré de ce côté. Satisfait par la deuxième place de L1, il visera la qualification pour les quarts de finale de Coupe de France, demain, face au PSG.
« On a reproché aux Niçois d’être trop tendres, la saison dernière. Deviez-vous combler cette lacune en priorité ?
J’ai beaucoup entendu ça, et je savais que Nice cherchait à avoir plus de puissance. On l’a bien compris avec Mario (Lemina, aussi arrivé en août) qui me ressemble à ce niveau. Julien (Fournier, le directeur du football)m’a dit qu’il voulait un profil comme le mien, et j’étais très enthousiaste car le projet du club est fantastique. Il y a beaucoup de talents ici, et ce mélange entre la puissance et la technique marche très bien.
Quelle importance revêt la dimension physique dans votre jeu ?
Je me connais très bien : si je n’apporte pas cet impact, je ne suis pas bon. Je dois toujours être à 100 %. Le week-end, la semaine, c’est pareil. En cinq contre cinq à l’entraînement, je suis extra dur car c’est comme ça qu’il faut jouer. Tu es un bon jeune ? Ok, je vais voir si tu es très bon et si tu es capable de faire plus (il tape du poing dans sa paume). C’est toujours dans un bon esprit, pour partager la même vision.
Cette exigence se partage facilement ?
On a beaucoup de jeunes, mais ils sont plus mûrs. Ce qui m’a surpris ici, c’est que tous les jeunes travaillent en salle avant la séance, et pas seulement en début de saison, quand chacun veut se montrer. Je n’avais jamais vu ça et c’était très facile de m’intégrer. On écoute la même musique, on est dans la même énergie. Parfois, tu as mal dormi, tu arrives fatigué, et il y a toujours un coéquipier pour te réveiller. J’aime notre mentalité. Tout le monde veut gagner, tout le temps. Dans le vestiaire, on a un tableau où on écrit le nom du pire joueur après la séance.
Vous n’avez jamais lu votre nom ?
On écrit des noms et chacun trace une barre pour voter. Quelqu’un a mis le mien une fois, et même si c’était impossible pour moi, je l’ai accepté… Mais personne n’a mis de barre (il éclate derire)! C’est une compétition marrante après une séance dure.
Comment être un leader sans parler français ?
Ce que tu montres a déjà valeur d’exemple. Je motive les autres à ma façon, pour garder tout le monde uni. Je parle peu à la mi-temps, vous m’entendrez parfois crier sur le terrain mais jamais dans le vestiaire. Je suis très calme, je ne suis pas toujours dans les conversations mais je vois tout. Aux repas, je m’assois toujours sur un côté de la pièce, c’est mon petit truc pour observer tout ce qui se passe.
Après d’excellents débuts, vous avez décliné avant de vous redresser. Comment expliquer cette évolution ?
Au début, tout est excitant : tu ne réfléchis pas, tu fonces. C’est normal d’avoir un contrecoup car la L1 est plus intense, mon corps a dû s’adapter. Personne ne me connaissait, les adversaires, les médias, même mes coéquipiers… Là, tout le monde m’a vu et j’ai dû évoluer. Je suis un joueur différent après six mois. Je m’évalue régulièrement, j’ai regardé ce que j’ai fait, pris des notes, et je sais mieux ce que je dois faire.
Votre engagement correspond à ce qu’aiment les supporters niçois…
Ah oui, je l’ai remarqué sur les réseaux sociaux. Les gens pensent que je préfère les duels, les tacles, mais j’aime aussi avoir le ballon ! J’avais 8 ans quand Ronaldinho a gagné le Ballon d’Or en 2005, j’étais fan de lui et je me suis dit : je veux aussi jouer au foot à la télé. J’ai joué numéro dix jusqu’à 12 ans.
Mark van Bommel a fait de vous un cadre du PSV. Est-il un modèle ?
Il m’a donné la chance d’être titulaire et je n’ai pas cessé de jouer ensuite. C’est une super personne : quand je jouais en réserve, il venait me parler, me dire que je pouvais faire mieux. Je suis très reconnaissant qu’un entraîneur comme lui ait pris le temps de me conseiller. J’étais prêt à mourir pour lui, mais je suis plus gentil sur le terrain, car tout le monde sait qu’il était vraiment très dur… Ça m’énerve de prendre des cartons car je veux être fair-play. Vous ne me verrez jamais tacler un joueur au genou, y aller pour faire mal. C’est important d’être dur, mais je suis toujours sur le ballon.
L’attaquant de Monaco Myron Boadu (21 ans) et l’ailier niçois Calvin Stengs (23 ans) peinent à franchir le cap entre les Pays-Bas et la France. Est-ce plus facile pour un milieu défensif ?
En France, il y a beaucoup de talents partout. C’est très physique et c’est plus facile de s’adapter pour un milieu comme moi, un peu plus vieux. Le public n’attendait rien de moi alors que la pression est bien plus grande pour eux, dont on veut des buts et des passes. Ils sont courageux d’être partis.
La vie est pourtant agréable ici…
Les gens me traitent de fou car je suis toujours en tee-shirt, short, claquettes. Là, le club m’a donné une veste pour la photo mais je transpire (rires),j’ai besoin d’être en manches courtes. J’aime sentir le vent sur mes bras. Même aux Pays-Bas, je n’ai jamais porté un manteau, ma famille vous le confirmera ! Dans ma voiture, la climatisation est à fond. Je mets la musique très fort, il fait très froid, mon corps aime ça. J’étais comme un zombie en août. Je n’arrivais à rien dans les oppositions, j’étais mort. Je me suis habitué à la chaleur niçoise et il n’y a que des bons côtés : je sors de chez moi, je vois le ciel, c’est top. Je suis sur le terrain, je vois les montagnes, c’est top. Je pense que je ne vais jamais m’arrêter de sourire ici. »
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