La rencontre a eu lieu fin mai. Neal Maupay, ses seize ans, son mètre soixante et onze et son regard intense, vous raconte sa blessure au genou droit (rupture du ligament antérieur) survenue mi-avril, les moments difficiles qui ont suivi mais « n'ont pas duré »et les révisions du bac STG(sciences et technologies de la gestion) qu'il est en train de passer. « J'espère l'avoir et, si possible, avec une mention. » Il se dégage de cet adolescent, qui aura dix-sept ans le 14 août, une incroyable impression de sérénité. Et de maturité. Car l'attaquant niçois, propulsé en L 1 au coeur de l'hiver, est aussi un phénomène de précocité hors des terrains. Pendant vingt-cinq minutes, le gamin de Valbonne (Alpes-Maritimes) a remonté le film de sa saison.
- Comment avez-vous vécu votre première grave blessure ?
- Sur le coup, ce n'est pas facile parce qu'on sait que c'est long mais, après, il faut relativiser, me dire que je suis encore jeune, que j'ai le temps. Le plus important, c'est de bien revenir, sans soucis.
- Vous attendiez-vous à jouer autant cette saison ?
- Non, pas forcément, parce que je suis très jeune. Le contexte était favorable pour mon entrée parce qu'il y avait pas mal de blessés, de suspendus. Le coach (Claude Puel) a été un peu obligé de faire appel à moi. Et puis après, ça s'est bien passé.
- Quel bilan faites-vous de vos quinze premiers matches en L 1 (1) ?
- Pour une première saison, c'est plutôt pas mal de marquer trois buts en L 1 et un en Coupe de France (2). J'aurais peut-être pu faire mieux sur les derniers matches, où j'étais un peu émoussé. Il faudra revenir plus fort.
- Ce qui a surpris, au moment de votre éclosion, c'est votre profil d'attaquant assez atypique...
- (Il coupe.) Je ne suis pas un monstre physique, c'est sûr. (Rires.) Mais je joue avec mes atouts, je tiens bien sur mes jambes, j'aime bien me placer, attendre le bon ballon, travailler pendant tout le match. Petit, je jouais déjà comme ça. Mon jeu, c'est faire le pressing sur les défenseurs, être au marquage pour les empêcher de relancer. Ça me permet d'être bien dans le match et d'exploiter les situations offensives.
- Comment, à seize ans, gère t-on la découverte de la L 1 ?
- Je l'ai très bien vécue parce que mon entourage, le club et mes coéquipiers se sont toujours très bien occupés de moi. Je suis dans un contexte parfait. Donc c'était très facile de m'adapter.
- Mais à votre âge, la pression des supporters, la présence des médias, n'est-ce pas quelque chose qui effraie ?
- Depuis tout petit, c'est un rêve. Donc, quand ça arrive, tu es super heureux, excité. L'engouement des supporters, c'est génial. Après, les médias, la télé, le monde qui s'intéresse davantage à toi, c'est assez drôle.
- Vous n'avez répondu qu'à très peu d'interviews, était-ce important d'être protégé ?
- Oui, si on m'avait laissé au milieu de tout ça, les médias, tous les appels de l'extérieur, ça aurait pu être difficile à gérer. Le club a empêché que les gens se ruent sur moi. Cela m'a aidé à me concentrer sur le foot et les études.
- Commencer tôt en L 1 représente-t-il une pression supplémentaire ?
- Pas du tout. Je le prends au contraire comme un atout : j'ai le temps, l'âge joue en ma faveur. Et puis, je suis jeune, c'est bien, mais je n'ai encore rien prouvé.
- Quand on vous écoute, on n'a pas l'impression de discuter avec un adolescent de seize ans. D'où vous vient cette maturité ?
- Je n'ai pas vraiment d'explications... Je suis toujours entouré d'adultes. Forcément, ça aide à grandir plus vite.
- De grandes équipes européennes vous supervisent depuis plusieurs mois. Comment le vivez-vous ?
- Je ne m'en suis pas vraiment préoccupé. Tant que mes parents, mon entourage ne me disent rien, ce ne sont que des paroles... C'est assez drôle, toi, tu n'es au courant de rien et les autres, ils pensent savoir où tu vas aller. Il ne faut pas faire attention à ce qui se dit. (Rires.)
- Souhaitez-vous vous installer à Nice sur le long terme ?
- J'y joue depuis les benjamins donc, forcément, je suis attaché à ce club. Pour l'instant, je ne me vois pas ailleurs. Je suis à Nice et je suis bien ici. »
(1) Dont trois titularisations.
(2) À Metz (N), en 32es de finale (3-2 a.p., le 6 janvier).