Haise : « Voir les gens avec la banane »

Franck Haise n’a pas encore en tête tout le calendrier de la saison à venir, mais l’entraîneur a déjà coché une date : celle de Lens-Nice, « au mois de septembre » (le week-end des 28-29, 6e journée). Nommé sur le banc du Gym moins de trois semaines après la fin du Championnat, celui qui a refait du RCL une formation européenne n’avait pu faire ses adieux au public de Bollaert « que par une lettre, parce que je ne savais pas plus tôt que j’allais partir ». « Trois jours avant de donner mon accord à Nice, je visitais encore une maison à Arras, pour acheter », raconte-t-il. Désormais vêtu au quotidien d’un survêtement de l’OGCN, le technicien (53 ans) s’est étendu hier sur son choix de poursuivre sa carrière sur la Côte d’Azur. Avec pour objectif premier le même que dans le Pas- de-Calais : continuer à voir ses joueurs véhiculer des émotions.

« Vous avez été très sollicité à la fin du printemps. Brighton et Marseille se sont positionnés. À partir de quand votre choix s’est-il porté sur Nice ?

 

Ç’a très vite été clair. Quand un club vous fait une proposition et que vous sentez que ça se passe bien, même s’il y a d’autres clubs qui vous disent d’attendre, je fonce et je ne reviens plus en arrière. À Nice, j’ai la chance de retrouver des gens que je connais depuis longtemps au sein de la cellule performance (en particulier son responsable, Laurent Bessière, arrivé de Lens en novembre 2022), ce qui est aussi un élément important, parce que je savais qu’on pourrait vite travailler ensemble. Nice, ce sont 23 saisons de Ligue 1 de suite, des résultats dans la première partie de tableau depuis dix ans. Il y a une organisation, des infrastructures.

 

On sait qu’Ineos regarde désormais plus vers Manchester United que vers Nice, qui va voir son budget continuer à décroître. Vous n’avez jamais eu de doute sur la nature des ambitions du club ?

 

Je sais qu’un budget, ça compte. Mais je ne vais pas dans un club pour le budget. Je vais dans un club parce que je ressens qu’il y a une bonne énergie, que les gens ont envie de travailler ensemble, qu’il y a d’abord une base qui est très solide. L’effectif est déjà de qualité. Ce n’est pas parce qu’un club va vous dire que vous avez plus de budget pour les transferts ou la masse salariale que ça va faire la différence. Je sais tout ce que vous dites, mais ce n’est pas mon premier critère de décision.

 

Vous n’avez pas eu d’assurance que les hommes au-dessus de vous allaient rester ?

 

Si, si, quand même ! (Il sourit.) Je leur ai dit : “J’espère que vous n’allez pas partir dans quinze jours, sinon il faut me le dire tout de suite !” On travaille en confiance. Après, le monde de l’entreprise reste le monde de l’entreprise. Mais le président Rivère (juillet 2011-janvier 2019 et depuis août 2019) est au club depuis treize ans, même s’il a connu une petite coupure. Fabrice (Bocquet, le directeur général depuis septembre 2022) mène un projet et n’a pas vocation à partir dans trois mois. L’idée, c’est qu’on travaille bien tous ensemble. 

 

Comment fait-on passer un groupe de joueurs d’un style très marqué à un autre ?

 

Je n’ai pas vu tous les matches de Nice, mais ce que je vois, c’est qu’à la fin de la saison, ils ont été 5es. Le jeu est une chose, mais les gens sont contents d’avoir un club en Ligue Europa et il faut laisser ce crédit-là au staff qui était là avant. Après, chaque entraîneur a ses idées. Tout est respectable. C’est sûr que l’idée que l’on a, c’est d’avoir un foot qui est tourné vers l’avant, qui est proactif, protagoniste, qui essaie d’impacter. Ça ne va pas se mettre en place en quinze jours ou deux mois, parce que les demandes sont clairement très différentes des précédentes. Mais c’est ma vision du foot et je vais continuer là- dessus. Même si, en fonction des joueurs et de leurs qualités, il y aura forcément des aménagements par rapport à ce qu’on pouvait faire avec l’effectif de Lens.

 

Par exemple ?

 

Dans les joueurs offensifs, il y a des profils qui sont peut-être plus accélérateurs de jeu, plus dribbleurs, avec plus de percussion, qu’une majorité des profils que je pouvais avoir à Lens. Il faut mettre les joueurs sur leurs points forts, tout en essayant d’enrichir leurs qualités de déplacement et de déplacements combinés. Quand on a des dribbleurs, il faut les utiliser. 

 

Ressentez-vous aussi celle de Nice depuis que vous êtes arrivé ?

 

Quand on n’est pas à Nice, on a une vision qui n’est pas la bonne. Localement, le club est très aimé, très suivi. Peut-être qu’à 200, 600 ou 1 000 kilomètres, les gens ne s’en rendent pas bien compte mais il y a une identité, un amour du club. Il va falloir qu’on travaille encore pour que cet amour vienne un peu plus au stade, mais je vis dans un petit village à quelques kilomètres du centre de Nice et les gens m’ont vite parlé du club et de leur amour pour lui.

 

Êtes-vous un entraîneur très différent de celui que vous étiez en 2020 en reprenant le poste de numéro 1 à Lens ?

 

Avez-vous désormais plus de certitudes ? Des certitudes, non. Je suis comme tous les entraîneurs : on doute toujours. J’ai des convictions fortes et j’ai la certitude qu’il faut toujours écouter, apprendre, se remettre en question. Mais c’est tout.

 

De quoi doutez-vous ?

 

De tout, en fait. Pas de mes capacités, mais je doute souvent. Va-t-on arriver à reproduire en match ce qu’on travaille ? Tout le monde va-t-il trouver sa place ? Il y a toujours des choses à régler, pour les pour emmener tout le monde autour d’un projet de jeu, d’un projet de vie. C’est du bon doute. Tant que je vais entraîner, je vais l’avoir. Si un entraîneur n’a pas ce questionnement, c’est qu’il n’a plus l’âme, il vaut mieux faire autre chose.

 

Vous n’avez pas douté au moment de vous retrouver face à un nouveau groupe ?

 

Pas du tout. Je pense que j’avais beaucoup de crédit à Lens, même si, dans le football, le crédit n’est pas éternel. Donc, j’avais aussi besoin de relever un nouveau défi, d’autant plus qu’avec Lens nous avions fait le maximum. Estimez-vous que votre effectif est au complet aujourd’hui ?

 

Il va y avoir des départs et des arrivées, bien entendu, mais l’effectif que j’ai là, c’est au moins 80 % de mon effectif.

 

Avec Jean-Clair Todibo ?

 

J’ai l’espoir de conserver tous les meilleurs joueurs mais il y a des impératifs aussi qui ne dépendent pas de moi. On verra s’il est encore là le 1er septembre (fin du mercato d’été).

 

Vous avez fait quatre ans et demi à Lens, quatre ans et demi à Nice, ce serait bien ?

 

On va dire cinq pour faire un chiffre rond (rires). J’étais particulièrement heureux à Lens et j’espère juste être aussi heureux et que les gens autour soient heureux. Que ça dure deux, trois, quatre, cinq ans, ce n’est pas le plus important. La réussite, ce sera de voir les gens avec la banane. » joueurs, le staff… L’objectif est de fédérer