Les présidents grognent

L’idée de finir la saison en cours à l’automne, portée par Jean Michel Aulas et Jean-Pierre Rivère, est jugée prématurée par les dirigeants de L1/L2, dontJacques-Henri Eyraud et Nasser al-Khelaïfi.


Les sorties conjointes, hier, dans nos colonnes, de Jean-Michel Aulas (OL) et de Jean-Pierre Rivère (Nice) sur la possibilité de finir cette saison 2019-2020 cet automne ont ravivé les différends entre présidents de club. Dans la foulée de la parution sur le site L’Équipe, lundi après-midi, de l’interview du patron de l’Olympique Lyonnais, Jacques-Henri Eyraud, le président marseillais, s’est étonné de tels propos, regrettant en substance qu’Aulas joue une partition personnelle sur le modèle de son entretien au Monde, il y a plusieurs semaines, où il militait pour une « saison blanche ».

 

La proposition du duo Aulas-Rivère, jugée prématurée, a alimenté les commentaires entre dirigeants de L1, mais aussi de L2, ces dernières heures. Et à ce stade, la majorité d’entre eux n’est pas favorable à ce scénario et s’étonne que la question n’ait pas été débattue au collège de L1 alors qu’Aulas en est le président et Rivère son vice-président.

 

« On avait même dit que l’on ne communiquerait pas avant d’en parler entre nous », regrette un président. Nasser al-Khelaïfi (PSG) a, quant à lui, été surpris d’être associé à un projet qui, selon son entourage, n’est pas conforme à sa volonté ni à celle de l’Association des clubs européens (ECA), à laquelle appartient aussi Lyon. « On se demande quel est l’objectif caché de l’un et l’autre derrière leur projet, critique un dirigeant de club. On dirait qu’ils ont besoin d’exister à tout prix. La loi stipule qu’une saison c’est douze mois, pas seize ou dix-huit. On change la loi alors ? De toute façon, cette idée n’est économiquement pas viable et elle n’a aucune résonance au sein de l’UEFA. »

 

Le coût du décalage estimé à plusieurs centaines de millions d’euros selon les opposants


Au sein de l’instance du football européen, cela n’est pas une option de travail (voir par ailleurs), pas pour le moment en tout cas. Et, pour la reprise post-confinement, la France dépendra des décisions de la Confédération européenne et des Championnats voisins.

 

D’autres représentants de club s’inquiètent des conséquences financières qu’une telle solution engendrerait selon eux. Loïc Féry, le patron du FC Lorient, a envoyé hier une note à ses collègues présidents où il estime le coût du décalage de la fin de saison à l’automne 2020. L’homme d’affaires table sur la nécessité de trouver plus d’un milliard d’euros de trésorerie, et ce hors recettes liées au mercato, pour tenir jusque-là.

 

D’autres calculs, moins pessimistes, évoquent une somme comprise entre 500 et 800 M€ à trouver. Ils partent cependant du principe que Canal + et beIN Sports ne paieraient pas les dernières échéances des droits télé pour cette fin de saison, soit 283 M€, ce qui n’est encore qu’une hypothèse. Mais aussi que les clubs ne pourraient pas compter sur les deux premiers versements de Mediapro, pour une somme avoisinante. Ils pourraient enfin devoir rembourser de l’argent à leurs sponsors.

 

 

« Et qu’est-ce que l’on fait des joueurs pendant ce temps ? demande un patron de L2. On ne les paye plus ? Dans ce cas, ils peuvent se retourner contre nous et dénoncer leur contrat. » Soit au final, un scénario qui, selon ses opposants, suscite plus d’interrogations sans réponses que le dé-confinement prévu le 11 mai prochain et le retour aux terrains.

 

La « saison blanche » est exclue


Réuni hier après-midi, le groupe de travail de la LFP sur les « scénarios de reprise » a repoussé l’idée d’une saison blanche si le Championnat ne reprenait pas. Cette option a été ardemment défendue par Vincent Ponsot et Jean-François Soucasse, respectivement directeurs généraux de Lyon et de Toulouse, mais n’a pas retenu l’attention. Leur insistance a même un peu agacé les participants, puisque l’OL n’est pas européen (*) si la L1 ne va pas à son terme et que Toulouse est dernier. Le groupe de travail a évoqué un scénario où l’on figerait les positions à l’issue de la 28e journée et un autre où ce serait au terme de la 27e, la dernière disputée complètement, puisque Strasbourg-PSG (28e) n’a pas pu se jouer. Sur le fond, il est envisagé de reprendre la philosophie de la FFF, qui a arrêté les championnats amateurs en maintenant une descente. Au niveau professionnel, la tendance est d’avoir deux descentes et deux montées. Mais rien n’est acté et c’est le conseil d’administration de la Ligue, voire l’assemblée générale, qui trancherait en cas de besoin.

 

Par ailleurs, avec la volonté de l’UEFA de voir les championnats domestiques se terminer le 3 août, afin d’achever les coupes d’Europe dans la foulée (voir par ailleurs), l’option d’une reprise de la L1 le 17 juin reste privilégiée. A. H. et E. M. (*) Seulement 7 e en Championnat, l’OL peut encore se qualifier en C3 s’il remporte une éventuelle finale de la Coupe de la Ligue face au PSG.